VduV #18: Yering Station Pinot noir 2006

À l’occasion de cette 18e édition des Vendredi du Vin, le président du mois, Rémy Charest du blogue À chacun sa bouteille nous invite à déguster et réfléchir sur le Pinot noir:

« S’il y a un cépage auquel je reviens toujours avec plaisir, c’est bien le pinot noir. De Bourgogne, de Suisse, de Nouvelle-Zélande, du Niagara, du Trentin-Haut-Adige et parfois de Californie ou même d’Australie.

À une condition. Que ça pinote. Qu’est-ce que ça veut dire? Eh ben voilà la question que ce 18e Vendredi du vin vous pose. Est-ce la cerise? La violette? La couleur? La concentration? La finesse? À vous de nous dire ce qui constitue pour vous du “vrai” pinot noir. »

Donc, après la réflexion de Mathieu Turbide sur la minéralité, voilà que nous avons à réfléchir au sujet de l’essence du Pinot Noir. Qu’elle est la spécificité du Pinot noir ?

 

 

Or, une des spécificités du Pinot Noir est d’être un cépage sensible au terroir, c’est-à-dire sensible au climat, à la température, au sous-sol, à l’exposition et enfin aux variations de millésime. Par conséquent, ce cépage s’exprime différemment, qu’on soit en Bourgogne, en Oregon ou même… en Australie. Or, c’est justement un vin d’Australie que j’ai décidé de déguster pour cet exercice : le Pinot noir 2006 du domaine de Yering Station. Je tâcherai, à travers ma dégustation, d’identifier les caractéristiques du Pinot noir, tout en identifiant la spécificité de ce domaine et de cette région.

Avant de parler du vin, disons quelques mots au sujet du domaine de Yering Station, situé dans la région de Yarra dans le sud de l’État de Victoria, non loin de Melbourne. A lui seul, ce domaine illustre l’histoire de la viticulture australienne. En effet, le domaine Yering Station est reconnu comme le plus ancien domaine de l’État de Victoria. Les premières vignes y furent plantées par William Ryrie et son frère en 1838. D’autres personnes suivront l’exemple des frères Ryrie, dont Paul de Castella, ainsi que plusieurs collons d’origine Suisse. L’État de Victoria devint en 1899 le plus important vignoble d’Australie. À cette époque, le Domaine de Yerring station remporta d’ailleurs le Grand Prix à l’exposition Internationale de Paris pour un vin produit dans l’hémisphère Sud.

À partir du 20e siècle, la viticulture de l’État de Victoria traverse différentes crises : phylloxera, surproduction, etc. desquelles cette région ne se relève qu’avec le renouveau de la viticulture australienne des années 1970 et 1980. Durant cette période, le domaine Yerring change plusieurs fois de propriétaires, avant d’être acheté en 1996 par la famille Rathbone, les propriétaires actuels.

Le domaine Yering est situé dans la Vallée de Yarra. En guise de comparaison, le climat de cette région est plus frais que celui de Bordeaux, mais plus chaud que celui de la Bourgogne. On y cultive la plupart des cépages internationaux, mais les vins issus du Pinot noir y sont particulièrement réputés. Le Pinot noir Yering Station 2006 ne fait pas exception et est une belle réussite.

La robe est de couleur grenat-cerise, assez limpide, avec des reflets orangés. On ne s’y trompe pas, on a sous les yeux un verre de Pinot noir. Au nez, les parfums sont charmeurs et complexes. Le nez est fruité et légèrement végétal, rappelant la cerise et la groseille. On sent qu’en vieillissant, ce vin développera des parfums tertiaires de cuir, également typique du Pinot noir. Le nez de ce vin impressionne par sa complexité. En bouche, la structure du vin est légère et souple, les tanins soyeux, mais présente un bel équilibre qui repose sur la fraîcheur marquée de ce vin. Les arômes sont les mêmes qu’au nez, quoique légèrement plus végétal. La fraîcheur témoigne d’un climat relativement frais, propice au Pinot noir.

J’ai été agréablement surpris et impressionné par ce vin. Je m’attendais à quelque chose de beaucoup plus style « Nouveau-monde », avec davantage de matière, de concentration et de bois. Or, j’ai été charmé par la complexité de son nez et la fraîcheur de sa bouche. J’ai enfin trouvé ce vin très représentatif d’un Pinot noir : la limpidité cristalline, une structure légère et souple, une bonne fraîcheur et des beaux arômes. L’intensité du fruit est un peu marquée et trahis agréablement l’origine « nouveau-monde » de ce vin. Ce vin demeure néanmoins tout en fraîcheur, ce qui n’est pas toujours le cas des vins australiens, et mérite d’être accompagné de votre meilleur steak de thon, filet de saumon terriaki ou steak de canard au cassis. Voilà un beau vin australien qui respecte à la lettre le style, la noblesse et la finesse du Pinot noir. Je suis certain que Philippe le Hardi serait de mon avis.

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