Vignerons

Dans l’usage courrant et dans les médias, on utilise régulièrement le concept de « vigneron ». Terme plus élégant que « viticulteur », renvoyant implicitement à une série d’images romantiques et à la longue tradition de l’art viticole, son emploi englobe cependant plusieurs groupes et catégories sociales distinctes, laissant croire en une activité unique conduite de bout en long par un seul individu : le vigneron.

 


Mais qui sont exactement les vignerons? 

 

D’un point de vue général, concernant les gens travaillant la terre, le vigneron se distingue d’abord des autres catégories sociales rurales.

 

Selon certains critères économiques, les gens employées dans les diverses étapes de la production viticole peuvent être différenciés de l’ensemble de la population agricole.

  • Selon les termes de Marcel Lachiver: « Les vignerons constituent une catégorie bien à part dans la société ancienne » (Lachiver, 1988 :236).

 

Pour preuve, ceux-ci disposent de quelques saints protecteurs spécifiques dont le principal est Saint-Vincent, martyr Espagnol représenté avec une serpette servant à tailler la vigne et dont la fête est le 22 janvier (Van Gennep, 1999(1951)).

 

Cependant, non seulement distinct des autres, la littérature présente souvent cette catégorie comme étant homogène. Au-delà de simples spécificités associées à leurs activités de productions, les vignerons sont représentés comme possédant certaines caractéristiques psychoaffectives propres.

 

« Au sein des campagnes françaises, les sociétés vigneronnes ont en tout temps présenté des caractères particuliers. Par opposition au comportement plutôt conservateur, voire l’immobilisme des régions d’agriculture, on se plaît à reconnaître leur esprit d’ouverture, leur aptitude à recevoir et adopter les nouveautés, tant dans le domaine matériel qu’au niveau des idées, bref leur progressisme » (Goujon, 1998 :81).

 

On leur reconnaît également une plus grande intégration sociale:

« Mais derrières toutes ces catégories, il reste une communauté de profession et de mode de vie qui englobe la vie quotidienne de ces êtres, pauvres ou plus aisés. C’est la fierté d’être vigneron, de vivre dans des villages où, châteaux mis à part, les conditions se recouvrent assez largement. Alors que dans les pays de labour il y a de gros exploitant qui mènent des fermes de plusieurs centaines d’hectares grâce à une main-d’œuvre de pauvres journaliers, ce qui accuse considérablement les écarts de fortune et de revenu, on trouve plus d’homogénéité dans les pays de vignoble, moins de soumission, plus d’esprit démocratique, plus de fraternité » (Lachiver, 1988 :246).

 

Enfin, ils seraient tributaire d’un attachement plus fort à la terre :

 

« Plus que tout autre paysan, le vigneron s’identifie à sa terre (…) » (Juste, 1991 :87).

 

Ces observations se révèlent probablement valables dans certains cas bien précis. Quoi qu’il en soit, ces auteurs présentent ces traits explicitement comme étant spécifiques aux « vignerons ». Peu importe le sujet traité, surgissent régulièrement des observations homogénéisant en une seule catégorie sociale, celle du « vigneron », des ordres sociaux distincts. 

 

  • Les auteurs reconnaissent avant tout dans le vigneron, « celui qui travaille la vigne » (Lachiver, 1988 :237). « Le vigneron est en effet, par définition, l’homme qui sait tailler la vigne » (Dion, 1959 :81).
  • Le dictionnaire de Furetière (1690) définit le vigneron comme celui, « qui a soin de faire les vignes, de travailler aux vignes » (cité par Garrier, 1998 :543).

 

Ces définitions sont claires, simples et précises, et, depuis le 12e siècle, le terme s’applique tant à un propriétaire qu’à un ouvrier, en autant qu’ils travaillent directement la vigne. Cependant, dans l’usage courrant, le terme fait l’objet d’une utilisation moins restrictive, alors qu’on retrouve différents types de vignerons.