Histoire des vins et du vignoble de Colombie-Britannique


L’histoire de la production de vin en Colombie-Britannique remonte au début du 20e siècle et est étroitement associée au développement de son agriculture et à la spécialisation dans les cultures fruitières.

Le Père Pandosy, est présenté dans plusieurs livres, brochures et articles comme le père de la viticulture en C-B. Dans une lettre de 1859, il évoque sa volonté de cultiver des vignes pour faire du vin à la mission qu’il vient de fonder sur la rive Est du lac Okanagan. Or, Bernard Lequime, dont les parents originaires de Bordeaux s’installent à la mission en 1861, soutient dans un article de 1937 ne jamais avoir vu de vignes à la Mission de son vivant (OHS, 1937, in Weber, 1999, p. 188).


Les cultures fruitières se développent à partir du début du 20e siècle, alors que nombre d’immigrants s’établissent dans l’intérieur des terres de la province. Des promoteurs fonciers, et le gouvernement provincial développent des systèmes d’irrigation pour favoriser cet établissement.

La première plantation attestée de vignes date de 1907, alors que W.L. Wilcox plante 3/4 d’acre avec des vignes américaines à Salmon Arm, dans le nord de la vallée de l’Okanagan (OHS, 1945, in Weber, 1999, p. 188).


Le pionner de la culture commerciale du raisin est J.W. Hugues qui entre 1926 et 1944 transforme en vignoble près de 121 ha (300 acres) de terre dans les environs de Kelowna (Fisher, 1981; Schreiner et Miller, 2007). Il introduit localement plusieurs variétés de vitis labrusca et d’hybrides en provenance de l’État de New York. Ses raisins sont commercialisés comme raisins de table dans la région et jusque dans les prairies, et comme raisins à vin destinés aux premières wineries qui voient le jour à ce moment.


Originaires de Hongrie, les frères Rittich apportent près de quarante variétés de vitis vinifera et les plantent au nord-est de Kelowna. Ils font différentes expérimentations et publient un livre à ce sujet en 1941 : European Grape Growing in cooler district where winter protection is neccessary. Ces variétés sont plus difficiles à cultiver, alors que les wineries de l’époque ne paient pas davantage pour celle-ci que pour les hybrides, ce qui n’encourage pas leur développement à ce moment.

Ouverture de la première winery de Colombie-Britannique à Victoria en 1923. Au lendemain de la prohibition, les fermiers de la région de Saanich, spécialisés dans la culture de loganberry (croisement entre la mure sauvage et la framboise), créent la Growers Wine Company. Ils produisent une sorte de porto, à base de ce fruit et de canne à sucre. La winery se tourne également vers la production de vin qu’elle produit à partir de raisins de l’Okanagan. Elle devient un débouché important qui favorise l’expansion de la viticulture dans l’Okanagan.


En 1932, G. Ghezzi, avec le concours d’immigrants italiens locaux, ouvre à Kelowna la Domestic winery and By-Product ltd, pour la production de cidre et autres vins de fruits. L’objectif est de développer des débouchés pour les fruits locaux invendus, alors que les producteurs subissent les contrecoups de la crise de 1929. Elle devient la Calona winery et, malgré une production à la qualité inégale, elle s’assure des revenus stables en se spécialisant dans la production de vin de messe pour l’Église catholique du Canada.


Alors que l’industrie provinciale du vin se développe, les producteurs profitent de lois protectionnistes. Les wineries ont d’abord l’obligation de se fournir en raisins produits dans la province. Si cette production est insuffisante, ils peuvent alors importer des raisins de Californie. Ceci avantage les producteurs de raisins qui n’ont même pas besoin de se préoccuper de produire des raisins de qualité, car ils savent qu’ils seront vendus. Entre contrepartie, les vins de la province sont moins taxés que les vins étrangers et profitent d’avantages commerciaux dans les BC liquors stores.

Quelques grandes wineries produisent de façon industrielle, à partir d’hybrides locaux et de raisins de Californie, des vins de marques (le célèbre Baby Duck) de piètre qualité. À la fin des années 1970, quatre wineries dominent le marché : Calona (devenu propriété de Standard Brand) Jordan & Ste. Michelle Cellar (propriété de Carling-O’Keefe Ltd), Andrés (Andrew Peller Ltd) et Casabello (propriété de Jonh Labatt Ltd). Mission Hill, fondée en 1966 peut également être incluse dans ce groupe, sous le nom de Uncle Ben’s Country Winery, mais avec une production moindre.


Un moratoire est levé en 1974 sur la délivrance de permis de production. De petites wineries commencent à voir le jour, produisant du vin à partir d’hybrides et parfois de vitis vinifera qu’ils plantent eux-mêmes (Gray Monk Winery, 1975,  Château John de Trepanier, 1979, Inniskillin, 1979, Jackson-Trigg, 1980, Hester Creek Estate Winery, 1983, SummerHill, 1986).

L’accord de libre-échange entre le Canada et les États-Unis en 1988 constitue un tournant important de l’histoire vitivinicole de Colombie-Britannique. Les grandes wineries ne sont plus obligées d’acheter les raisins locaux et leurs vins sont désormais aussi taxés que les vins étrangers. Le gouvernement, en concertation avec les producteurs, met sur pied un plan pour augmenter la qualité de la production. Des subventions sont disponibles pour arracher les hybrides et replanter des cultivars de vitis vinifera. Plusieurs producteurs prennent simplement les subventions pour arracher les hybrides et se retirent. La superficie planter à vigne chute de 3456 âcres en 1988 à 1047 âcres en 1989.

La mise sur pied du BC Wine Institue en 1990 reflète la volonté de la part d’intérêts privés et publics de développer une industrie de vin de qualité. La mise sur pied de VQA (Vintner’s Quality Alliance) est un autre effort conscient pour accroitre la qualité et regrouper les vins de la province sous une marque commune.

En 1994, la winery Mission Hill met l’Okanagan sur la carte en remportant le titre de Best Chardonay in the World au International Wine and Spirit Competition qui se tient à Londres. Les juges eux-mêmes n’en reviennent pas.

Ces transformations attirent différents investisseurs d’ailleurs au Canada et on voit graduellement apparaitre de nouvelles wineries. De 12 wineries en 1988, leur nombre passe à 17 en 1990, 32 en 1995, 60 en 2000, 119, en 2005, 182 en 2010, 251 en 2015 et 275 en 2017. Se retrouvant désormais en compétition sur leur propre marché avec les producteurs du monde entier, on voit se développer une production de qualité.