Commerce du vin au Moyen-Âge

La chute de Rome ne signifie pas la fin de la viticulture. Elle conserve, aux yeux des hommes du Moyen Âge, une valeur religieuse et de prestige qu’elle comportait dans la société Antique.

 


L’Église joue un grand rôle dans l’acclimatation à des conditions toujours plus extrêmes de la viticulture.

 

D’abord les évêques assurent l’approvisionnement de leurs villes en vin par l’implantation de vignobles.

« Assurant, dans son diocèse, la continuité de l’usage du vin, et pratiquant, dans ses vignes, les meilleurs méthodes de culture, l’évêque maintient les conditions les plus nécessaire à la bonne transmission de l’art viticole » (Dion, 1959 :175).

Néanmoins, une fois répandue sur l’ensemble de l’Europe, la production commerciale du vin se concentre à l’intérieur de régions de viticulture spécialisées.

 

Ces concentrations reflètent deux caractéristiques :

 

  1. La configuration de la demande;
  2. Et l’existence de moyens de transport peu dispendieux.

 


Avec les Grecs et les Romains, nous avons vu l’avantage que conféraient les positions d’avant garde par rapport aux régions importatrices.

 

 

 

Ces positions conférerons toujours un avantage décisif aux producteurs et aux commerçants.

« Et comme ces positions elles-mêmes, les gros profits du commerce du vin se déplacèrent vers le Nord ou le Nord-Ouest, lorsque l’art des éleveurs de vignes eût élaboré des espèces plus résistantes au froid ou à l’humidité, grâce auxquelles les plantations purent être rapprochées de la mer ou des routes océaniques y donnant accès » (Dion, 1959 :127).

 

Avant l’arrivée du chemin de fer, seules les rivières et la mer permettaient de transporter à un coût raisonnable les lourdes cargaisons sur de longues distances en direction des marchés des villes et de l’Europe du Nord, où le vin se vend au plus haut prix.

 

 

 

Il suffit d’observer l’emplacement actuel des grands vignobles français pour s’en convaincre :
  • Bordeaux le long de la Gironde;
  • Le Val de Loire,
  • La Bourgogne sur les rives de la Saône,
  • Et enfin, les Côtes du Rhône, pour ne citer que les mieux connus.

 


Enfin, la production s’oriente en fonction de la demande. Au Moyen Âge, les vins nouveaux priment et font la renommée des vignobles du nord de la France jusqu’au 16e siècle.

 

 

 

Quand les goûts changent, que les gens du nord apprennent à déguster d’autres cru, les vignobles du sud prennent la relève.

 

  • Dans ce commerce à longue distance, seuls les vins de qualités supérieure valent la peine d’être exportés, incitant certains à perfectionner continuellement leur art.

 

  • Les nobles, les ecclésiastiques et les bourgeois aussi exigent de la qualité.

 

  • Cependant, avec l’expansion des villes, une nouvelle demande pour des vins bon marché se développe :
« En ces temps déjà, les vins de la plus basse catégorie, longtemps considérés comme impropres au commerce comme bon seulement pour la consommation domestique, trouvaient, dans les classes populaire des grandes villes, un débit assez important pour rendre rémunératrice, à l’entour de ces mêmes villes, une viticulture bien différente –tant par le rang social de ses adeptes que par ses procédés et son objet- de celle que pratiquaient par tradition les bourgeois considérables, défenseurs de la renommée du cru » (Dion, 1959 :469).

 

Alors que certains restent accrochés à la viticulture de qualité, principalement les gens des couches sociales supérieures, la majorité des petits producteurs se tournent vers une course au rendement.

« Il faudra attendre le début du 20ième siècle pour que, le vignoble français près de sa perte, les responsables de la IIIe République, de compagnie avec les plus courageux et les plus lucides vignerons, comprennent qu’il était nécessaire de mettre de l’ordre dans le paysage viticole français » (Lachiver, 1988 :336).


Par le passé, pour les petits viticulteurs, il est bien plus simple de produire en quantité qu’en qualité, puisque cette dernière nécessite des investissement dispendieux en équipements, et d’avoir le capital nécessaire pour se permettre de laisser vieillir les vins avant de les mettre en marché.

 

  • La culture du raisin est une culture intensive nécessitant moins de terres mais plus de bras que les céréales, et elle occupe le viticulteur de façon plus constante tout au long de l’année. Quoique selon les régions certains pratiquent la polyculture, avec moins de deux hectares le viticulteur peu faire vivre décemment sa famille.

 

  • Également, s’agissant d’une culture commerciale, la vie de ces gens est directement orientée vers le marché où ils écoulent leur vin, et où il se procurent l’ensemble de leur subsistance, ce qui contribue à les distinguer du reste du monde agricole, souvent tourné vers une agriculture d’autosubsistance.

 

 

 

Un moine franciscain italien, le frère Salimbene, constate incrédule en 1245 que :

« dans le vaste espace que comprend le diocèse de cette ville  [Preuilly près de Provins], monts, coteaux, plaines et champs sont, comme je l’ai vu de mes propres yeux, couverts de vignes. Les gens de ce pays, en effet, ne sèment point, ne moissonnent point, n’amassent point dans les greniers. Il leur suffit d’envoyer leur vin à Paris par la rivière toute proche, qui précisément y descend. La vente du vin en cette ville leur procure de beaux profits qui leur paient entièrement le vivre et le vêtement » (cité par Lachiver, 1988 :76).