Cousino-Macul Finis Terrae verticale

Mathieu et moi avons été invité à une dégustation des vins de la Maison Cousino-Macul du Chili. Afin de partager cette expérience avec vous, j’en ai fait un compte-rendu détaillé, se rapprochant de l’ethnographie. Pour aller directement aux commentaires de dégustations, rendez-vous à la fin de ce texte.

En ce froid et magnifique jeudi après-midi ensoleillé de février, je me rends au Sofitel, un chic hôtel de la rue Sherbrooke à Montréal. De l’extérieur, l’immeuble est une belle structure en verre et en acier. L’entrée est comme tous les lobby d’hôtel, avec des voitures, des voyageurs et des chasseurs. À l’intérieur, il y a un grand hall avec des plafonds hauts. On n’a pas tout à fait l’impression d’être dans un hôtel, mais plutôt dans un édifice publique, tel une tour à bureaux, ou encore dans un musée. Les murs sont recouverts de panneaux de bois teints en noir et un mur de fenêtres laisse pénétrer la lumière du jour qui illumine l’intérieur. Je suis en avance, alors je m’assieds dans un sofa pour patienter et observer. Nous avons été invité par les Vins Philippe Dandurand à une dégustation des vins Cousino-Macul à l’occasion du Festival Montréal en lumière.

Je jette un coup d’oeil du côté du restaurant Renoir. De toutes évidences, c’est là que ça se passe. Une grande affiche à la porte annonce le festival Montréal en lumière et à l’intérieur, des employés s’affèrent à monter la salle. D’autres personnes, à l’allure responsable et à l’air concentré, des documents sous le bras, observent en silence. Les gens arrivent tranquillement et patientent comme moi, en s’assoyant dans les divans de l’hôtel, en tournant en rond et en errant dans le lobby de l’hôtel. À un moment Mathieu arrive, il m’aperçoit et vient me rejoindre et nous discutons un peu.

À 16h00, les gens se dirigent vers le restaurant, ce que nous faisons également. En entrant, on nous offre une verre de blancs. Pendant que nous enlevons nos manteaux, une dame vient à notre rencontre et se présente: « Les frères sommelier virtuel je suppose? » C’est Marguerite des vins Dandurand, la personne qui nous a invité. Le vin que nous buvons est unchardonay de la maison Cousino-Macul. Avant la dégustation, il y a un cocktail où on nous sert des hors-d’oeuvres d’inspiration chilienne. Il s’agit des recettes du chef Guillermo Rodriguez qui vient d’ailleurs saluer les gens. Sauf quelques exceptions, les gens présents ne semblent pas se connaître. Ici et là, des groupes de quatre ou cinq personnes discutent. Des serveurs se promènent avec des bouchés cocktails. Elles sont excellentes, mais étrangement, personne ne sautent dessus, même moi, contrairement à mon habitude. Peut-être que comme moi, les autres personnes désirent conserver leur appétit et leur palais pour le vin? On est là, on se présente, on échange des cartes, on discute avec différentes personnes, on boit et on mange un peu. La majorité des gens se sont bien habillés pour l’occasion, quoique quelques uns, dont moi, ont des tenus plus décontractées.

 

 

Vers 17h00, on nous invite à monter dans une salle à l’étage. À l’entrée, il y a une table pour accueillir les gens des médias. Il semble donc y avoir deux catégories de personnes : les médias et les autres. Nous faisons partie des médias, alors nous avons droit à une trousse de documents sur l’hôtel et un cadeau: un livre des recettes des restaurants les plus fins de Montréal. Dans la salle, les plafonds sont hauts, les murs sont recouverts de panneaux en bois clair et la pièce est bien éclairée. Mathieu qui en a vu des salles de réunion dans des hôtels trouvent celle-ci très belle. Il y a trois rangées de tables recouvertes de nappes vertes, une allée centrale, une affiche de la maison Cousino-Macul et un lutrin à l’avant. Il doit y avoir une soixantaine de place, alors que nous sommes environs quarante personnes. Il n’y a que des invités, certains par les Vins Philippe Dandurand et d’autres par Sofitel. Les gens s’assoient tranquillement. Afin de pouvoir observer l’ensemble de la salle, je me mets à l’arrière. Nous avons devant nous six verres. Il y a des corbeilles de pain, des verres et des bouteilles d’eau. On nous offre un saut que je refuse : « Non merci, je ne crache pas le vin ».

La dégustation commence alors véritablement. Nous sommes ici pour une « verticale » de Finis Terrae, un vin haut-de-gamme de la maison Cousino-Macul. Une « verticale » consiste à déguster et à comparer un même vin, mais dans des millésimes différents. Ainsi, on nous annonce que nous boirons un 1992 -à corriger dans notre documentation- un 1995, un 1997, un 2001 et un 2005. Moi est Mathieu sommes bien entourés. D’un côté il y a deux journalistes critiques de vin. Alors que de l’autre, nous avons Michel, conseillé à la Saq, ainsi que sa copine. Nous sommes ainsi fin près à déguster. Bien que j’aimerais avoir les six vins dans mes verres, mais il me faut attendre nos « rations ». En effet, on nous sert les vins les uns après les autres, en ordre chronologiques, c’est-à-dire du plus vieux au plus jeune (je parle évidemment des vins et non pas des personnes).

Pendant que des garçons nous servent, Catalina, la représentante de Cousino-Macul, nous introduit les vins et la maison. Malheureusement, je n’attrape que des bribes de son discours, trop occupé que je suis à déguster mon premier verre et à regarder tout autour. Graduellement, on nous apporte les autres verres tout en nous présentant à chaque fois la spécificité de chacun des vins. Les présentations sont faites par deux jeunes hommes qui nous expliquent la spécificité de chaque vin, tel la qualité du millésime en question ou encore l’encépagement. Le vin Finis Terrae est un assemblage de cabernet-sauvignon et de merlot, mais dont les proportion changent en fonction des millésimes. Mais à nouveau, je ne porte pas beaucoup attention à ces présentations qui sont un peu mornes, alors que je me concentre de plus en plus sur ma dégustation. Quelques personnes, dont moi, poseront une ou deux questions. Mais dans l’ensemble, il n’y a pas beaucoup d’échanges entre les gens. Les gens échangent un peu les uns avec les autres, mais seulement avec les personnes assises directement à côté d’eux.

Durant la dégustation, il y a les serveurs qui circulent, ainsi que Marguerite qui anime un peu la dégustation en posant des questions à l’assemblée en général ou encore directement à certaines personnes qu’elle connaît. À l’exception des quelques questions posées et des réponses formulées à voix hautes, il n’y a pas beaucoup d’échanges entre les participants et nous ne saurons malheureusement pas ce que les autres personnes présentes penseront des vins. Durant la dégustation, il y a quelques personnes qui restent debout à l’arrière, probablement des responsables de l’hôtel. Pour le Sofitel, comme pour les Vins Phlippe Dandurand et la maison Cousino-Macul, cette dégustation est principalement une occasion de relations publiques.

Au départ, les premiers vins sont un peu « fermés ». Mais après qu’ils aient « respiré », nous pouvons véritablement les apprécier. À la vue, le 1992, le 1995 et le 1997 sont de couleurs assez orangé, les 1999 et 2001 sont plutôt de couleur cerise profond, tandis que le 2005 est de couleur rouge grenat. Cette palette de teintes alant de l’orangé vers le violet nous annonce le degré d’évolution des vins. Sur ce point, je trouve la couleur des 1997, 1995 et 1992 très similaires.

Au nez, le Finis Terrae 1992 est d’abord fumé, ce qui s’estompe rapidement. Les vins n’ont pas été carafé afin qu’ils ne s’éventent pas complètement. Nous avons ainsi le loisir de les observer évoluer dans nos verres. Après l’avoir laissé respiré, on dénote dans le 1992 des arômes tertiaires de truffes qui virent rapidement vers des arômes de dattes et de Sherry. L’acidité est basse alors que les tanins sont fondus. Le vin est très bon, mais sur son déclin.

Le Finis Terrae 1995 est moins fumé au nez. Il est plutôt végétal avec des arômes de poivron vert et de tomate qui me rappellent la sauce à spaghetti. Le conseillé en vin de la Saq à ma gauche hésite sur la sauce à spaghetti, mais acquiesce aux arômes de poivron et de tomate. Les nez a également quelque chose de mentholé. En bouche, l’acidité est faible et les tanins sont fondus, alors que des arômes de fruits confiturés dominent avec une pointe d’amertume qui rappelle, dixit le conseillé, le tabac.

Le Finis Terrae 1997 se démarque par un nez dominé par des arômes tertiaires végétales et chimiques. J’adore ce nez. Je dois avoir un faible pour le chimique… En bouche, l’acidité est faible alors que les tanins sont fondus. Si le nez me plait, le vins n’est pas très expressif en bouche et même plutôt court. Le Finis Terrae 1999 a pour sa part un nez dominé par la figue et m’apparaît également court en bouche. Si les tannins sont fondus, ils ont conservé une certaine âpreté.

Avec le Finis Terrae 2001, on se retrouve devant un vin à point et équilibré. C’est selon Bill Zacharkiw, critique de vin à The Gazette assis à notre droite, le plus équilibré des six vins. Ce vin comporte une part plus importante de merlot, soit 85%, ce qui influe sur son style. De couleur rouge cerise profond, le nez est fruité et végétal : poivron et tomate, l’acidité est faible et les tanins sont fondus. C’est en effet sur ce point, le plus équilibré des six vins.

Enfin, le Finis Terrae 2005 est franchement différent. Non seulement l’étiquette de la bouteille est différente, mais la couleur grenat du vin le distingue automatiquement des autres. Le nez est celui d’un vin jeune, qui sort à peine des cuves, même pour un 2005. Le nez est fruité, alors que la bouche est bien plus fraiche, en raison de l’acidité plus soutenu. Avec ses arômes marqués de fruits rouges, c’est presque du bonbon.

En conclusion, ce fut une dégustation très agréable, intéressante et instructive. D’abord, on a pu observer l’évolution de la couleur avec le temps, du violacé à l’orangé. Plus intéressant encore, c’était l’évolution du nez. Avec les 2001, on était véritablement dans les arômes de dates et de figues. Ensuite, avec les 1995, 1997 et 1999, on était dans les fruits confiturés avec des arômes tertiaires chimique, végétal ou torréfié. Enfin, en bouche, nous pouvions comparer l’évolution des tannins et de l’acidité. Tous avaient une acidité faible, sauf le 2001 et évidemment le 2005, et tous étaient moyennement tanniques, gouleyant, coulant et affirmés. Bref, de très beaux vins, des rencontres charmantes, une ambiance décontractée et une soirée extrêmement agréable.

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